Essai d'identification de traits prosodiques spécifiques chez des patients présentant de l'anhédonie dans le cadre d'un diagnostic de dépression

Abstract

Depuis une trentaine d'années, plusieurs études montrent que « la description des qualités de la voix sous-tendue par la caractérisation des déterminations anatomo-physiologiques peut servir de base à l'étude des modifications thymiques» (Menahem, 1983). Le but de notre étude a été d'obtenir des données complémentaires confirmant les corrélations entre les modifications vocales et l'anhédonie due à la dépression. D’autre part, nous avons tenté de déterminer les valeurs des paramètres prosodiques qui sont propre à certaines émotions (joie et tendresse) chez des personnes non dépressives et chez des personnes souffrant d’épisode dépressif majeur. Pour cela nous nous sommes intéressés à la durée totale de production, à la durée moyenne des pauses, au pourcentage de pause dans la production, au pourcentage de changement de direction de la fréquence, au pourcentage de monotonie, au pourcentage de courbes ascendantes et de courbes descendantes de la fréquence. Nous avons recruté 32 participants dépressifs appariés avec 32 participants contrôles sains. D'abord, l'anamnèse et les tests psychologiques nous ont permis d'obtenir des informations concernant leur voix et leur profil psychologique. Ensuite, nous avons récolté des échantillons vocaux avec une tâche d’induction d’émotion via des extraits de films, une tâche de lecture de phrases et sur la voyelle /a/ tenue 5 secondes. Les extraits de films ont permis d’induire trois types d’émotion différente soit neutre, tendre et amusante. Notre étude montre des patterns vocaux différents entre les participants sains et les participants souffrant d’EDM. Chez les participants sains, une émotion positive (tendresse et amusement) induit un discours plus long et ponctué de plus de pauses (comparé à un discours neutre). La description d’un film neutre est plus monotone sur le plan prosodique tandis que la description d’un film tendre présente plus de courbes prosodiques descendantes. Chez les participants dépressifs, le discours est temporellement allongé avec les émotions mais reste significativement moins long que le discours des participants sains. De plus, leur articulation est ralentie. Quelle que soit l’émotion, chez les participants dépressifs, on observe une absence de modulation prosodique et une absence de différenciation dans le pourcentage de pauses.