L'adaptation de la fertilisation micro dose par les agriculteurs de la commune de Nagréongo s'intègre-t-elle à un mode de gestion durable ?

Abstract

Les sols du Burkina Faso subissent de fortes dégradations qui se traduisent par une diminution de la productivité agricole. Pendant que les rendements diminuent, la croissance démographique continue, exacerbant le risque d’insécurité alimentaire. Les agriculteurs du Sahel font face à de nombreuses contraintes agricoles, pourtant les taux d’utilisation de fertilisants restent très faibles, en raison des prix hors d’atteinte des doses recommandées et le risque d’investissement que cela implique (Twomlow et al., 2010). En réponse à ces contraintes d’utilisation, ICRISAT a mis en place une technologie qui consiste à enfouir de toutes petites doses d’engrais à quelques centimètres de la plante (Blessing et al, 2017). Son efficacité pour l’amélioration des rendements a été prouvée à de nombreuses reprises. Cependant il s’est avéré que l’application de cette technique, non combinée à d’autres pratiques agronomiques de conservation de l’eau et du sol, entraîne des bilans nutritifs négatifs du sol plus importants qu’en absence d’engrais (Tovihoudji, 2018). C’est pourquoi il est important d’observer comment les agriculteurs se sont approprié la technique et si cela correspond à un mode de gestion durable. Pour ce faire, nous avons établi une enquête dans la commune de Nagréongo, auprès de 120 agriculteurs et de 69 femmes qui appliquent la microdose, afin de déterminer dans un premier temps, le type de sol et le type de cultures sur lesquels ils préfèrent appliquer la technique et leur comportement par rapport à la distance qui sépare le champ et la concession. Ensuite, identifier leurs différentes pratiques agronomiques associées à la microdose ainsi que leurs modifications des pratiques habituelles. Les données récoltées sont qualitatives et ont fait l’objet d’analyses comparatives (test khi carré) et descriptives. Les résultats nous ont montré que les agriculteurs préfèrent associer les fertilisants organiques à la microdose plutôt que de les appliquer seuls, ils ont également amélioré leurs méthodes de fertilisation organique. Les résultats indiquent également qu’ils ont intensifié leur labour, que la microdose n’est pas suffisamment associée à d’autres pratiques agronomiques et enfin qu’elle est souvent appliquée sur des cultures céréalières non précédées de cultures légumineuses. L’ensemble des observations nous conduisent à penser que l’adoption de la technique microdose par les agriculteurs de la commune de Nagréongo ne semble pas s’intégrer à un mode de gestion durable. Nous avons cependant observé une augmentation d’agriculteurs qui laissaient d’avantage de résidus de cultures sur le champ grâce à l’amélioration des rendements, pratique qui pourrait contribuer à amenuir les effets négatifs de la microdose.