Effets de la relégation dans l'enseignement qualifiant sur l'estime de soi et la motivation des élèves du deuxième degré : étude de leur perception

Abstract

En Belgique, le système d’orientation se veut libre, en donnant aux élèves la possibilité de choisir leur voie. Toutefois, à partir deuxième degré de l’enseignement secondaire, les enseignants sont amenés à émettre leur avis sur l’orientation de leurs élèves, lors du conseil de classe de fin d’année. Ainsi, trois attestations d’orientation leur sont délivrées : l’attestation de réussite, l’attestation de réussite avec restriction, l’attestation d’échec. Bien qu’il soit souhaitable que les élèves puissent choisir leur orientation en fonction de leurs aspirations, il est fréquent que, certains d’entre eux, soient orientés vers des filières qui ne correspondent pas à leurs aspirations, par suite de leurs résultats insuffisants (Lent, 2008). Cette étude a pour objectif d’analyser les répercussions, d’une relégation vers l’enseignement qualifiant ou d’un redoublement dans l’enseignement général, sur l’estime de soi et la motivation des élèves au regard de ceux ayant choisi cette orientation. La population cible se constitue d’élèves de troisième et quatrième année secondaire provenant de quatorze écoles. Les 504 élèves sollicités sont répartis comme suit : 160 ayant obtenu l’attestation restrictive (AOB) et 344 ayant obtenu l’attestation de réussite (AOA). Le questionnaire utilisé comprend plusieurs aspects, tels que les caractéristiques individuelles des élèves (âge, genre, etc.) ainsi que les performances passées ou actuelles (nombre d’échecs, redoublement, etc.). La conception de soi des élèves est évaluée à l’aide du questionnaire de Harter (1988), qui mesure l’estime de soi des adolescents à travers cinq sous-échelles : compétence scolaire, adaptation sociale, compétence dans le travail, comportement et valeur globale de soi. Les aspirations scolaires et professionnelles des élèves sont également prises en compte. La motivation des élèves est mesurée à l’aide de l’échelle d’orientations motivationnelles de Ntamakiliro et al. (2000), répartis en trois dimensions : l’orientation vers soi, l’orientation vers le travail scolaire et la tendance au moindre effort. La supervision parentale est évaluée ainsi que la pression exercée par les pairs, à l’aide de l’échelle PPI (Brown et al., 1986). Par ailleurs, des entretiens ont été menés avec dix enseignants titulaires de classe, en troisième ou quatrième année, afin de connaitre les raisons factuelles évoquées lors du conseil de classe pour orienter un élève vers une filière qualifiante. Les résultats obtenus concluent que l’orientation des élèves est principalement basée sur le nombre d’échecs scolaires. Cette orientation basée sur l’échec scolaire peut contribuer à hiérarchiser les filières, où les élèves en difficulté sont souvent orientés vers les filières qualifiantes, témoignant ainsi d’une orientation de sélection négative (Canzittu, 2019). Au-delà des considérations purement académiques, les décisions prises lors des conseils de classe montrent des répercussions majeures sur la vie des élèves. Les élèves relégués présentent une estime de soi et une motivation plus faible ainsi qu’une perception de leur compétence comme inférieures, à ceux ayant choisi de s’orienter vers l’enseignement qualifiant, par choix. Il est également préoccupant de constater que 27% des élèves relégués et 54% des élèves ayant redoublé sont insatisfaits de leur parcours. Ceci soulève des interrogations quant à l’efficacité du système d’orientation et suggère l’existence de potentielles lacunes, à prendre en compte, dans l’analyse et l’amélioration du système d’orientation en FW-B.